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Coup de coeur BD : Mon année. 1, Printemps

samedi 5 octobre 2013, par Odile Cognard

Bande dessinée.
Public : collège (4e-3e), lycée et LP et lycée.

Taniguchi, Jiro, Morvan, Jean-David. Mon année. 1, Printemps. Dargaud, 2009. 1 vol. (64 p.). 18 €. 978-2-5050-0751-7.

Les métissages sont nombreux de la bande dessinée occidentale vers le manga et réciproquement, mais ils sont rarement revendiqués comme projet éditorial. C’est le cas ici, pour cette série qui associe le scénariste Jean-David Morvan à un des mangakas préférés des occidentaux, Jiro Taniguchi. Le résultat tient d’ailleurs plus de la bande dessinée à l’occidentale : grand format, couleur et narration classique. Mais l’influence manga est là, dans le trait familier de Taniguchi, les onomatopées caractéristiques qui font bruire les décors, certaines ellipses qui rythment le récit, et un regard particulier sur le monde.

Cette série en quatre saisons raconte la vie de Capucine, une petite fille rieuse autour de laquelle gravite une famille unie. Le premier « chapitre » donne le ton de l’histoire : toute une famille est réunie dans la maison de campagne cossue nichée dans le bocage normand pour fêter l’anniversaire de Capucine. Hormis la tante Sandrine, qui est gravement malade, tout concourt à une ambiance de fête chaleureuse. Famille aimante, grands-parents attentifs, aisance matérielle... le tableau est harmonieux, jusqu’à la note discordante, le léger décalage qui change tout : au moment du départ, à l’heure de saluer les grands-parents qui s’en vont, Capucine se précipite pour retenir son chiot qui s’est échappé, se jetant sous les roues de la voiture que le grand-père stoppe in extremis. Là où d’autres parents auraient explosé de colère, le papa et la maman de Capucine consolent et rassurent : la petite fille est porteuse de trisomie 21. Elle n’en n’a que très peu les caractéristiques physiques, ce qui complique les choses : en la voyant, on ne peut pas deviner qu’elle appréhende le monde d’une façon tout-à-fait différente... Autour d’elle, un tissu de tendresse et de dévouement amortit les chocs avec le monde : sa maîtresse, sa psychomotricienne, sa Nounou et son Ninnin. Pas assez toutefois pour empêcher la situation de se compliquer : elle a déjà redoublé deux fois son CP, la directrice de l’école souhaite qu’elle soit inscrite dans un établissement spécialisé parce qu’elle monopolise trop l’attention de la maîtresse. Quant à ses parents, qui assument avec courage les difficultés quotidiennes de l’éducation d’une petite fille handicapée, leur solidité est mise en question par un quotidien fatiguant qui génère des problèmes de couple. Lui gère une hostellerie à Reims, tandis qu’elle jongle entre son emploi de vendeuse à temps partiel dans une boutique de sous-vêtements, sa maison et sa fille. Pendant la grossesse, quand on leur a annoncé la maladie du bébé, ils ont pris ensemble la décision de garder cet enfant, de l’élever de leur mieux en la stimulant pour la faire progresser...

Le talent de Taniguchi pour donner à voir et à sentir les paysages et les ambiances s’allie judicieusement à celui de Morvan pour faire vivre les personnages. Capucine est extrêmement attachante, comme on imagine qu’elle pourrait l’être dans la « vraie vie ». Elle possède un vrai don d’empathie, qu’elle traduit par des dessins qui émaillent le récit. La collaboration ne déçoit pas nos attentes : voici un album juste, d’une grande qualité psychologique et graphique, à proposer aux collégiens (4e-3e) et aux lycéens (LP et lycée). En attendant la suite !

Coup de coeur de Caroline Vernay, professeure documentaliste au collège de Brienon-sur Armançon jusqu’en 2010, C. Vernay exerce au collège Saint-Exupéry de Saint-Jean-de-Braye (45).

avril 2010